Bien aidé par un documentaire de Jean-Charles Deniau, et Serge Kostine, « la fin de l'URSS ».
Depuis 1985 et ses 54 ans, Mikhaïl Gorbatchev occupe la fonction de secrétaire général du parti communiste de l'union soviétique. Il rajeunit l'équipe dirigeante et engage des réformes radicales.
En politique étrangère, il a dégarni le rideau fer, symbole de la guerre froide entre le bloc de l'ouest et celui de l'est depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Ainsi, il permet à des pays satellites de l'union soviétique, comme la Pologne, la Hongrie, la Tchécoslovaquie de reprendre leur destin en main.
En politique intérieure, il a entrepris la démocratisation de l'union soviétique en lançant deux slogans révolutionnaires : la Glasnots, c'est à dire la liberté de paroles et la Perestroïka.
Cette dernière constitue une réorganisation de l'économie et une restructuration sociale.
Malgré tout, en 1989, le bilan est mitigé. La société respire enfin puisqu’elle connaît la fin de la censure des journaux et médias. Les libertés individuelles sont de plus en plus respectées. Les internements arbitraires ont disparu. Cependant, la vie quotidienne des russes se dégrade. Dans ce contexte, se déroule l'entrevue de Malte. Gorbatchev va chercher à obtenir l'arrêt de l'escalade nucléaire avec les États-Unis, pour des raisons morales, mais aussi économiques. La réduction drastique des dépenses militaires de son pays lui permettra de financer sa fameuse Perestroïka, et d'élever le niveau de vie de sa population. Le président américain Georges.W.Bush père, et Mister Gorbatchev tombent d'accord et sonne le glas de la fin de la guerre froide.
Sous l’impulsion de ces nouvelles conditions, le dirigeant russe se rend à Vilnius où les lituaniens demandent leur indépendance. Avec les deux autres pays baltes, Lettonie et Estonie, la Lituanie a été annexée par l'URSS en 1940. Après avoir jaugé le climat du pays, Gorbatchev se rend compte que la majorité de la population lituanienne veut son indépendance. Deux mois plus tard, sans l'accord de Gorbatchev, la Lituanie la proclame unilatéralement. Pour la première fois dans l'histoire de l'URSS, une de ses républiques fait sécession. L'affaire est grave puisque la contagion est probable. Mikhaïl Gorbatchev temporise. Doué de principes moraux, d'une aversion pour la guerre et de son expérience en tant que juriste, il ne réprime pas les lituaniens. Et pour continuer en toute légalité ses fameuses réformes, il se fait élire président de l'URSS par le congrès des députés du peuple. Dans la foulée, il supprime le monopole du parti communiste, instaurant ainsi le multipartisme en union soviétique. Le système institutionnel soviétique était à bout de souffle, dépassé. Le parti communiste et l'appareil administratif exerçait un contrôle total. Comme une évidence de forces en présence, toutes les initiatives réformatrices de Gorbatchev se sont heurtées à la résistance de la Nomenclatura, les hauts dignitaires du parti communiste.
Ces derniers commencèrent à freiner tout le processus réformateur, socialiste de Gorbatchev.
Certains pensaient qu'on ne pouvait démanteler le parti communiste qu'en mettant en pièce l'URSS. D'autres ne pouvaient comprendre ce raisonnement et préférait voir l'URSS comme une Union soviétique fédérale, démocrate et sociale.
Un programme est lancé, celui de libéraliser l'économie soviétique. Cependant, comment parvenir à une saine, sereine économie de marché, si des règles de fonctionnement éthiques ne sont pas suffisamment signifiantes ? Le président Gorbatchev est alors confronté à l'éternel dilemme : marxisme et capitalisme sont-ils compatibles ? Autrement dit, peut-on organiser un marché libre dans une économie dirigée ? La Perestroïka, censée répondre positivement à cette question n'a pas les effets escomptés. L'ouverture à la concurrence dans le commerce est un échec. En effet, si les prix des marchandises sont restés fixes, les producteurs devenus indépendants ne veulent plus vendre à perte.
Résultats, la production s'effondre et les étals des magasins se vident. La pénurie s'installe. Gorbatchev tergiverse, ne sait plus que faire. L'inflation grandit, le rouble s'est écroulé et le dollar grimpe. Des mendiants apparaissent dans les rues de Moscou, du jamais vu pour les citoyens d'alors. Les salaires et les retraites ne sont plus versées régulièrement.
Retour vers le futur. Gorbatchev, vingt ans plus tard revient sur sa tentative de Perestroïka avortée et confie, « Il est impossible de réussir la transition économique d'un pays en 300 jours. On a échoué. On a vraiment échoué. »
Retour vers le passé. Un homme, jusqu'alors en disgrâce politique, intervient sur le devant de la scène, Boris Eltsine. Ce haut fonctionnaire provincial, reconnu pour son efficacité et son franc parler, avait été nommé par Gorbatchev premier secrétaire du parti à Moscou avant d'être écarté pour avoir critiqué les lenteurs de la Perestroïka.
Aujourd'hui, Gorbatchev regrette d'avoir permis à Eltsine d'avoir été nommé député du peuple, à la tête des réformes communistes, et à juste titre. Ce dernier ne cesse de montrer son hostilité à Gorbatchev et s'en prend régulièrement à lui au parlement. La politique étrangère de Gorbatchev est tout aussi critiquée que les ratés de sa Perestroïka. On l'accuse d'avoir cédé aux occidentaux, non seulement en ne négociant pas assez sérieusement le retrait de ses troupes en Allemagne de l'Ouest, mais encore sur un point beaucoup plus important.
En fait, l'administration Bush a dit à Mikhaïl Gorbatchev, « Nous sommes tous d'accord, il faut une Allemagne unifiée, cette question ne peut plus être reposée, c'est historiquement juste. »
Mais que faire de cette Allemagne unie ? Où la placer ? Une solution était de placer l'Allemagne dans l'Organisation du Traité d'Atlantique Nord, cette organisation politico-militaire des pays occidentaux, plus connue sous le nom de l'OTAN, afin de la contrôler. Mais Gorbatchev ne voulait pas de cette proposition, qui constituait une trop grande capitulation, une trop grande concession pour lui. Alors une proposition a fait surface. Si l'Allemagne est membre de l'OTAN, alors cette organisation ne pourra plus s'étendre vers l'est. En d'autres termes, l'OTAN devrait s'arrêter aux frontières de l'Allemagne. Les occidentaux ont fait cette promesse à Gorbatchev qui l'a acceptée. Ce dernier a commis une grande erreur. Il a fait confiance aux américains. Pour cause, il était évident que les hongrois, les polonais, les tchécoslovaques feraient tout pour intégrer l'OTAN, repoussant ainsi les limites de l'organisation aux frontières de l'URSS.
Gorbatchev, de plus en plus affaiblit, obtient pourtant un succès lorsqu'il est reconduit dans ses fonctions de secrétaire général du parti communiste en juillet 1990.
Un coup de théâtre se projette sur le devant de la scène. Boris Eltsine claque la porte du parti, le jour même, à Moscou, dans la salle du Congrès, au Kremlin. En fait, par cet acte, Eltsine s'avance vers un nouveau pouvoir potentiel.
A l'automne 1990, voici la situation. Les démocrates ont laissé tomber Gorbatchev, après l'abandon du programme des « 500 jours ». Et les communistes l'ont aussi abandonné suivant ce principe simple, « À quoi peux-tu nous servir maintenant, après tout ce que tu nous as fait ? ». Gorbatchev, ou l'homme suspendu dans le vide. Cette position intenable le contraint à choisir. Comme il lui est impossible de s'entendre avec Eltsine pour des raisons politiques et personnelles, il se tourne vers les communistes, bien qu'ils lui reprochent d'avoir supprimer le monopole de leur parti. Il constitue avec eux une nouvelle équipe à poigne. Il nomme Boris Pougo, ministre de l'Intérieur, Dimitri Iazov, ministre de la Défense, Vladimir Krioutchkov, patron du KGB, et il fait de nouvelles concessions à l'aile dure, en désignant Guennadi Ianaïev, son vice-président, et Valentin Pavlov, son premier ministre. Ce changement de cap est tellement flagrant que son plus fidèle compagnon d'armes, Edouard Chevarnadze démissionne en dénonçant l'avènement d'une dictature certaine, fort de ses renseignements acquis auprès de membres du KGB. Malgré tout, Gorbatchev n'a pas voulu croire son ami, ne pensant pas qu'une dictature se préparait.
Le durcissement du régime à Moscou pousse les conservateurs communistes des pays Baltes à relever la tête. En juillet 1990, ils descendent dans les rues de Vilnius et de Riga pour réclamer le maintien de leurs pays dans l'espace soviétique. Ils se heurtent aux indépendantistes. Certains meetings indépendantistes comptaient plus de 500 000 personnes.
Le premier secrétaire du parti communiste lituanien établi entre 1988 et 1991, Algirdas Brazauskas, fut convié à Moscou, où les hauts fonctionnaires communistes ont proposé de lui offrir tous les moyens nécessaires pour étouffer ce mouvement. Algirdas décline cette offre et les propositions de ce genre s'exileront salasses elles- aussi.
Un coup de force se prépare à Vilnius. Les commandos sont sur le pied de guerre, un ordre de Moscou et ils interviennent. Personne ne voulait assumer la décision d'intervenir au Kremlin.
L 'indécision au pouvoir provoque une situation trouble, et les membres de commandos affrontent des nationalistes repliés dans l'immeuble de la télévision lituanienne. Des dizaines de morts, des centaines de blessés, un coup de pinceaux sanguinaire qui se reproduit à Riga en Lettonie. Gorbatchev fait alors un discours officiel, suites à ces mésaventures humaines, en déplorant les événements tragiques survenus à Vilnius, et Riga. Les morts dans l'enceinte de ces deux capitales génèrent un énorme retentissement en URSS, mais aussi en Occident.
Le 17 mars 1991, le président Gorbatchev décide d'organiser un référendum, le premier et le dernier sur le territoire russe. Cela peut être considérer, de la part de Gorbatchev, comme une étape dans la démocratisation du peuple russe. Il s'agit pour le peuple de se prononcer pour le maintien ou non de l'URSS, dans le cadre d'un nouveau traité d'union qui reste à définir. Les électeurs répondent oui à 76 %. Le même jour, un autre référendum a lieu en Russie seulement. La population se prononce à 70 % pour l'instauration d'un poste de président de Russie, élu au suffrage universel. Le 16 juin, Boris Eltsine prête serment. C'est lui, qui vient d'être élu premier président de Russie.
Moscou est désormais le siège de deux pouvoirs qui s'opposent. Celui de l'Union Soviétique, représenté par Gorbatchev, avec celui de Russie représenté par Eltsine, qui incarne, lui, l'espoir du peuple russe. Deux hommes pour un seul pouvoir.
Dans cette lutte, Gorbatchev est handicapé par son bilan économique. Pour sortir du marasme dans lequel on l'accuse d'avoir plongé son pays, il n'a pas d'autres solutions que de se tourner vers les occidentaux. Il veut obtenir une aide financière à grande échelle.
Il se fait donc inviter à Londres, le 15 juillet 1991, lors d'un sommet des pays les plus industrialisés de la planète, le G7. Malheureusement, le courant occidental gagnant préférait en fait Boris Eltsine, ce leader à poigne, brutal, très opposé à la démocratie. C'était une manière de garder la Russie sous son contrôle. Gorbatchev, lui, aurait tenté de mener la Russie vers la démocratie. Une démocratie sociale, s'orientant vers une forme d'indépendance que l'ouest préférait éviter. Il valait mieux avoir en face un dictateur à qui on pouvait faire faire ce qu'on voulait. Si le G7 avait donné à Gorbatchev une aide économique et financière conséquente, une vraie ligne de crédit, jamais la tentative de coup d'état à l'encontre de Gorbatchev qui s'en suivra n'aurait pu se réaliser.
Car, Mikhaïl Gorbatchev, revenu bredouille de Londres, sait que sa position politique ne tient plus qu'à un fil. Les vacances approchent, et effectivement des bruts de coups d'états courent à Moscou.
Ils sont justifiés, car un putsch est bel et bien en gestation. Il a été préparé de longue date par des proches de Gorbatchev, ou membres de son gouvernement. Les futurs putschistes sont fermement opposés au traité que prépare Gorbatchev. Ce traité doit faire de l'union soviétique, une fédération d'états souverains, qui pourront disposés d'une très large indépendance. Et alors que Mikhaïl Gorbatchev et sa famille se reposent en Crimée, dans la villa présidentielle, le 18 août se passe un événement inquiétant. Le ministère de la Défense coupe l'électricité et le téléphone, dans toute la villa. Les militaires entourant Gorbatchev ont reçu l'ordre de quitter la demeure, ordre qu'ils ont suivi. En même temps, des navires de l'union soviétique patrouille sur la côte de la mer noire, dans le but d'installer un climat de tension dans la résidence. Peu après, une délégation de ministres et de membres du parti force la porte du président Gorbatchev, et lui demande d'instaurer l'état d'urgence dans le pays, signifiant, en d'autres termes, cautionner un coup d'état.